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Derrière les chiffres, les mots… et parfois les sourires : paroles de bénéficiaires

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Action : maintien dans le logement de 4 familles en précarité dont l’activité professionnelle s’est arrêtée et aide alimentaire auprès de 12 ménages.

« Le 16 mars 2020, la ville s’est scindée en deux, d’un côté les personnes dont les métiers étaient indispensables au prendre soin collectif (celles qui soignent, qui nourrissent, celles qui nettoient, celles qui mettent à l’abri et protègent…), de l’autre des femmes et des hommes confinés. Nous avons découvert une ville vide et silencieuse, des eaux fluviales qui redevenaient bleues, des oiseaux qui chantaient. Dans les interstices de cette vie-là, loin de toute considération, des femmes et des hommes, le 16 mars 2020, ont soudain cessé d’exister.

Souvent récemment arrivés dans la ville, ces femmes et ces hommes ont perdu un travail non déclaré mais qui leur permettait de vivre, sans qu’aucun filet de sécurité ne vienne amortir la chute. A la peur d’être sans-papier s’est ajoutée celle des contrôles liés au confinement. Parfois, on ne met plus le nez dehors, confinant en même temps les enfants dans des espaces souvent exigus et parfois insalubres. Il a fallu composer avec des distributions alimentaires brusquement fermées ou difficilement accessibles et des relais qui ont selon les lieux eu du mal à se mettre en place.

C’est à cette existence brutalement déconsidérée que les aides que nous avons pu apporter grâce à la Fondation Abbé Pierre ont redonné une place : l’aide au paiement de loyers à des propriétaires privés avec des contrats de location informels a permis d’éviter en plein confinement des mises à la rue. Madame H.le dit lorsque nous nous revoyons mi-mai : « sans vous, je ne sais pas comment nous aurions fait. ». Elle a les larmes aux yeux tant cette période a été éprouvante, mais elle reste pudique. Son travail a pu reprendre, et elle apporte lors de ce premier entretien de retrouvailles un carnet de tickets de bus. « Ce n’est pas grand-chose, mais c’est pour aider celles qui en ont besoin ». La reprise du travail permet cela : exister de nouveau et faire de la solidarité un mouvement dans lequel on reçoit, dans une forme d’urgence vitale, et dans lequel on donne lorsque l’apaisement revient.

PasserElles Buissonnières n’est pas une association caritative, et n’a pas d’action d’aide financière ou alimentaire. Seule l’inédit de la situation et les besoins repérés et non pourvus nous ont conduits à ce partenariat avec la Fondation Abbé Pierre pour apporter une réponse à l’urgence, permettre de conserver un toit, de se nourrir et de nourrir ses enfants. Ce texte est donc un merci à la Fondation Abbé Pierre, qui nous a fait confiance dans la répartition des aides allouées, et à chacune et chacun des donateurs anonymes qui ont permis ces actions. Toutes et tous ont pris place dans une chaîne de solidarité dont le caractère indispensable s’est affirmé. Cette expérience commune nous questionne sur la manière d’aborder l’avenir. Nous savons qu’il faudra veiller à ce que la bienveillance d’une période particulière soit sans cesse affirmée parce que la vie de la Cité ne devrait pas reprendre son cours en oubliant combien « le prendre soin » mérite encore et toujours plus d’attention. Nous en avons ensemble découvert si besoin était le caractère politique, celui sur lequel le vivre ensemble peut s’appuyer. »

Marion Huisssoud-Gachet, co-directrice de l’association PasserElles Buissonières (Lyon), qui a pu délivrer 100 chèques de 10 € à 12 ménages accompagnés par les équipes de la structure.

Action : mise en place de maraudes alimentaires dans le secteur de Tournon-sur-Rhône jusqu'à Saint Peray et Guilherand-Granges.

"Début Avril, il est apparu comme une évidence d’intervenir « hors nos murs » pour les publics, ces derniers ne pouvant accéder aux nombreux dispositifs et aux diverses associations caritatives fermées pour cause de crise sanitaire. Même si quelques-uns ont pu venir à notre rencontre et obtenir du soutien au portail de notre CHRS situé à la même adresse que notre accueil de jour, une autre partie, par crainte ou autre raison, s’est retrouvée coupée de tous liens sociaux et soutiens divers.

Dans ce contexte l’association a pu cibler 2 postes comme besoins essentiels : Les colis alimentaires ainsi que les produits d’hygiène et d’entretien. Grâce au fonds d’urgence, de nombreuses maraudes ont très rapidement pu être réalisées sur la période de confinement. Jusqu’au 31 mai, environ 50 visites à domicile ont pu être effectuées en logement, squat, point de rendez-vous en ville ou quelques distributions effectuées via l’accueil au portail de la structure.

Cette action renforcée « d’aller vers » a été très appréciée par les personnes, notamment celles ne pouvant bénéficier de notre accueil de jour fermé durant les semaines de confinement. Durant le confinement, 26 personnes ont pu être soutenues au total. 8 personnes sont à la rue, et les 18 autres vivent en logement ou bien se trouvent hébergées chez des tiers.

Toutes rencontraient des difficultés significatives pour assurer le quotidien : sans ressources vivant en temps normal de « manche et débrouille », bénéficiaires du RSA ou vivant de petites missions souvent suspendues durant la période de crise sanitaire.

En parallèle de chaque colis alimentaire le travailleur social effectuant la maraude a pu proposer divers produits d’hygiène et masques (gel hydro alcoolique à emporter pour les personnes à la rue, lingettes, savon pousse mousse…). Un complément au colis très apprécié par le public. Même si beaucoup restent conscients de l’importance des règles d’hygiène actuelles, beaucoup ne priorisent pas dans leur poste d’achat ce type de produit ou ne parviennent pas à s’en procurer directement."

Jonathan Callet, Chef de service à Entraide et Abri (07)

Action : distribution de jeux aux enfants confinés sur le quartier Tarentaise-Beaubrun (Saint-Etienne) et équipement en ordinateurs pour permettre le travail scolaire à distance

« Nous avons déjà engagé 3000 euros qui nous ont permis d'équiper 12 familles en ordinateurs fixes et de mettre à disposition 4 ordinateurs portables sur cette période particulière et pour la prévision de besoins ponctuels type temps de formation, dossiers pour démarches administratives...L'association Envie nous a permis d'équiper bien plus de familles que prévu, c'est vraiment une bonne nouvelle. Ce soutien financier a permis de vraies respirations pour un grand nombre de personnes. »

Josiane GUNTHER, co-Présidente de l’association Terrain d’entente (Saint Etienne).

Témoignage d’Amel, habitante dans le quartier Tarentaise-Beaubrun (St Etienne)

« Les deux premiers jours de confinement ont été très difficiles. J'étais malade, j'avais besoin de me reposer. Les enfants n'avaient pas l'habitude de rester enfermés à la maison. Quand ils voulaient sortir je leur disais "si vous sortez, vous allez m'apporter la mort!".

J'ai eu mal de les retenir, surtout les adolescents pour lesquels c'était le plus difficile. Les deux plus grands avaient envie de faire des jeux sur la play en même temps, ils étaient beaucoup en conflit. Peu à peu, on a trouvé un mode d'organisation. Dans notre appartement, nous n'avons pas de balcon. Il y a une petite cour pour tous les habitants de l'immeuble, mais nos enfants n'y allaient pas. Ils ont passé un mois, sans voir le soleil! Puis leur père les a sortis un par un, pour qu'ils prennent un peu l'air.

Le sport à la maison, c'était difficile, on avait peur de déranger les voisins. (…) Le confinement nous a donné le temps de réfléchir. A tout ce à quoi on tenait, de ce qu'on avait "avant". Notre liberté de sortir. On en tenait pas compte avant: le plaisir de partager le trajet de l'école avec les enfants, de voir les gens…Tout ça nous a manqué. Le confinement m'a donné le temps de réfléchir sur ce qu'il y a de mieux à faire.

Nos réunions au café des femmes, c'étaient des moments ensemble. Des moments de partage, d'échanges pour savoir ce qu'il se passe.

Il faut changer notre vie après le confinement.

Je voudrais faire beaucoup de sport pour prendre soin de ma santé. Je voudrais avoir la liberté de sortir pour faire des choses pour moi-même et pour les autres. Pour aider. Donner de mon mieux. Laisser de bonnes traces. Est-ce que j'ai fait du mal? Est-ce que j'ai demandé pardon? Est-ce que j'ai fait du bien? Quel est le sens de ma vie? Aujourd'hui, c'est le dé confinement et je ne me sens pas libre. L'état nous dit "vous allez sortir 3 semaines en test" Qu'est-ce que ça veut dire "en test" ? Et le virus, il est où ? »