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Confinement : une souffrance pour les personnes en grande précarité

À Valenciennes, la Boutique Solidarité de la Fondation a réouvert ses portes le 11 mai et a pris le temps d’écouter les personnes accueillies qui ont souffert du confinement…

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Depuis la fin du confinement la Boutique Solidarité de Valenciennes a d’abord accueilli les personnes à la rue par groupe de 5, toutes les 45 minutes. Depuis le 2 juin, elle a un peu assoupli les règles et accueille désormais 15 à 18 personnes, en fonction des places assises et de la météo puisque 2 tables sont disponibles dans la petite cour intérieure. Pour répondre à la demande et ne pénaliser personne, le roulement est maintenu et toutes les 45 minutes, un autre groupe de personnes est accueilli.

Jeudi 18 juin, un temps de parole était organisé avec les personnes accueillies qui le souhaitaient pour parler de la période du confinement que beaucoup ont mal vécu. Un moment nécessaire pour « tourner la page » et partager ensemble la souffrance de l’isolement.

Martine et Messaoud ont toutes deux un long parcours de rue et vivent aujourd’hui en logements adaptés. Pour elles, la Boutique Solidarité est bien plus qu’un lieu d’accueil de jour, c’est aussi une famille…

 

« Honnêtement, c’était vraiment dramatique, tout était fermé… la Boutique Solidarité, les associations « midi partage » et l’« Ajar ». Même pour les papiers, c’était compliqué.

Je suis partie chez mon frère pendant deux mois et demi. Même si on était deux, ça a été très dur ! Je ne pouvais voir personne, ni mes nièces ni mes amies. On a joué aux cartes avec mon frère, parfois aux dames ; on a discuté et puis, à force, nous n’avions plus rien à nous dire… C’était la poisse.

Si on reste seule dans son appartement, c’est la mort.  J’ai pris une amende car je m’étais trompé de date sur un papier…

J’avais l’impression d’être seule sur terre, comme s’il y avait eu une guerre. »

Maintenant, je suis plus renfermée sur moi-même, je ne serre plus la main, ne fait plus la bise. J’ai l’impression d’avoir été enfermée dans une cave et de ne plus pouvoir sortir. Avant je me levais à 7 heures et pendant le confinement, vers 10-11h car il n’y avait rien à faire.

Le fait de réfléchir sur ma vie pendant ce confinement m’a boostée. J’aimerais partir du foyer Adoma où je suis et trouver un appartement et un travail. Je veux me sentir libre.

La remise en question fut positive. Car si tu ne remets pas en question tu plonges. J’ai réfléchi sur mes fréquentations, la consommation d’alcool … Le confinement a aussi été bénéfique pour la terre, il y avait moins de pollution.

Mon cousin de 12 ans est mort du covid 19, il a eu une monté de fièvre a plus de 40° et il est décédé dans la nuit.  J’avais peur, quand j’allais faire les magasins j’éviter les gens et je respecter la distance d’un mètre entre chaque personne. J’espère qu’il n’y aura pas de deuxième vague. »

Messaoud, accueillie à la Boutique Solidarité de Valenciennes depuis plus de 15 ans.

 

« J’ai trouvé ça très dur, on devait rester à la maison. Je ne pouvais même pas venir ici donc rester chez moi. Je me suis beaucoup ennuyé.

Je sortais deux fois deux heures. Je me suis faite contrôler…

Le plus dur pour moi a été d’être toute seule, du coup je parlais avec mes chats. Le temps était long.  Je ne pouvais pas venir à la Boutique Solidarité, cela m’a manqué car je ne pouvais pas parlé avec les personnes, je me suis sentie seule.

J’ai eu beaucoup de temps pour m’occuper de mes chats que je considère comme mes enfants. Ils aiment bien quand je suis là et que je m’occupe d’eux. Cela m’a permis de penser à autres chose et de ne pas faire de bêtise. J’ai peur que cela recommence, qu’il se passe quelque chose, une deuxième vague de confinement.

J’ai commencé à fumer quand j’étais à l’hôpital, maintenant j’aimerais arrêter de fumer.

Ici on m’a aidée alors que les personnes étaient des inconnues. Ma famille ne m’a pas aidée comme ici. C’est pour ça que j’aime bien venir ici. »

Martine, accueillie à la Boutique de Valenciennes depuis plus de 15 ans.